Les étapes de conception d’un plan de compensation • le contenu
La conception d’un plan de compensation repose sur des étapes indispensables. En effet, nombreux sont les plans imparfaits voire inefficaces qui ont négligé certaines règles, ou qui sont fondés sur des schémas inadaptés. Voici donc une série d’articles qui vous permettra de comprendre en détail ces étapes. Dans ce second article, on aborde le sujet du contenu du plan de compensation ; les indicateurs, les méthodes de rétribution, les mécanismes de courbes, et bien d’autres sujets.
Préambule
Deuxième article dédié aux étapes de conception d’un plan de compensation, où nous aborderons cette fois-ci le contenu.
Un plan de compensation robuste ne doit pas simplement prévoir un pourcentage des ventes que l’on rétrocède à un•e commercial•e : cette pratique courante, bien qu’ayant des qualités indéniables (intelligibilité, corrélation aux résultats de l’organisation), est très réductrice face à la complexité que représente une organisation commerciale.
Il doit au contraire intégrer un ensemble de paramètres et mécanismes de calcul qui vont permettre de libérer le potentiel de chaque Sales, et de guider efficacement une stratégie commerciale.
Succinctement, nous vous présenterons les indicateurs (KPIs), leur poids, la façon de rétribuer les équipes commerciales en fonction de leur valeur, les mécanismes d’accélération/décélération et la fréquence.
Choisir le(s) KPI(s)
Il s’agit là du coeur du plan de compensation : quels sont les indicateurs sur lesquels vont être incentivés les différentes équipes commerciales ? Faut-il en privilégier un seul ou plusieurs ? Comment s’assurer une motivation à aller chercher systématiquement plus haut ?
L’usage veut que le nombre de KPIs intégrés à un plan soit compris entre 1 et 3. L’avantage d’un plan avec un KPI unique est que le focus sera direct et évident. Côté contre, il ne permettra pas de chasser plusieurs ambitions à la fois.
💡 L’opposition la plus fréquente concerne l’utilisation d’un KPI de valeur vs. un KPI de volume. Par exemple, vaut-il mieux incentiver une équipe d’Account Executives sur le # de clients signés, sur le montant apporté, ou les deux ? Il n’y a pas forcément de bonne réponse : tout dépend de la stratégie commerciale, du produit et du marché !
Déterminer le mode de rétribution en fonction du KPI
L’étape d’après est la construction des mécaniques liées aux KPIs choisis. Il existe deux grandes méthodes pour rétribuer un•e Sales en fonction d’un KPI :
Pourcentage du KPI (rate-based KPI) : il n’y aura pas d’objectif affiché, mais le•a commercial•e sera directement rémunéré•e en % de la valeur du KPI. L’avantage de cette méthode est d’être d’une simplicité idéale pour les équipes concernées, et de leur permettre de se projeter facilement et de manière positive (”je n’ai pas la contrainte d’un objectif à atteindre, je récupère simplement un % de ce que je signe”). A l’inverse, c’est un système qui doit être mis au point avec une grande précision pour aligner parfaitement les objectifs individuels (qui ne seront jamais mentionnés directement), l’OTVE et le % de rétrocession.
⇒ Exemple : un AE se voit rétrocéder 5% du CA signé, avec un OTVE de 2 500€, avec un objectif non communiqué de 50 000€. Alors à 120% d’atteinte, il aura gagné 5% x 120% x 50 000€ = 3 000€ = 120% x 2 500€ (120% de son OTVE), ce qui confirme que le plan est correctement paramétré.
KPI sur objectif (quota-based KPI) : le % d’atteinte se calcule directement par rapport à la valeur réelle du KPI vs. l’objectif, qui est dès lors communiqué. L’avantage de cette méthode est de mettre les équipes au diapason des objectifs globaux, et plus impliquées dès le début dans la réalisation de leurs objectifs (”si je ne fais rien pour atteindre mon objectif je vais gagner zéro”).
⇒ Exemple : un AE a signé 60 000€ de CA pour un objectif de 50 000€, alors son pourcentage d’atteinte sera de 60 000/50 000 = 120%, ce qui revient au même que dans l’exemple précédent.
Comme on peut l’observer, ces deux méthodes aboutissent exactement aux mêmes conclusions ; elles induisent simplement des comportements différents. Choisir l’une ou l’autre dépendra d’un grand nombre de paramètres internes à l’organisation, notamment en terme de management. Simplement, on considère que les Sales très seniors préfèrent généralement un % du KPI, et que les Sales plus juniors ont besoin d’un cadre avec un objectif périodique clair.
Choisir le poids de chaque KPI dans le plan
Se pose ensuite la question du poids des KPIs. Il est coutume de dire qu’un poids trop faible sur un KPI n’incitera aucunement un•e commercial•e à le travailler : et c’est vrai ! Généralement, en dessous de 30%, le KPI sera délaissé au profit des autres. Attention donc à ne pas en laisser un de côté : il vaut mieux le supprimer du plan que de le garder pour se rassurer avec un poids minime. Cela va créer de la confusion plus qu’autre chose.
💡 Aussi, le poids de chaque KPI peut être régulièrement et facilement modifié pour driver un focus stratégique temporaire et de courte durée (e.g. : lancement d’une nouvelle offre sur quelques semaines, vente d’un produit saisonnier, etc.).
Construire des mécanismes de courbes (accélérateur/décélérateur)
Enfin, le dernier élément à paramétrer sera la courbe à appliquer sur le % d’atteinte du KPI. On entend souvent parler d’accélérateur/décélérateur mais il ne s’agit pas que de ça.
Il s’agit d’un ensemble de fonctions que l’on peut appliquer à un % d’atteinte du KPI (en abscisse) pour obtenir un % de performance (en ordonnée) différencié. Pour faire simple, quand on atteinte 87% sur objectif sur un KPI donné, le % de performance (ou d’atteinte du variable) ne sera pas forcément égal à 87%.
Les mécanismes ne seront pas exactement les mêmes selon le mode de rétribution utilisé (pourcentage du KPI vs. KPI sur objectif) :
- Pourcentage du KPI : on préférera une solution où le % de rétribution augmente passé un certain seuil et diminue en-dessous d’un autre, vs. une baseline.
- KPI sur objectif : on pourra utiliser un accélérateur au-delà de 100% d’atteinte du KPI, un décélérateur en-deçà de 80%, et utiliser une fonction linéaire entre. Mais pas que ! Il existe d’autres méthodes pouvant s’appliquer à des KPIs plus complexe : fonction affine avec un coefficient élevé, combinaison avec floor et cap, etc.
Ces mécanismes sont très importants : ils doivent et vont inciter la sur-performance (et ainsi éviter un comportement bien connu qui consiste à garder certaines opportunités “au chaud” en fin de période pour se les voir récompenser sur la période suivante), et prévenir la sous-performance.
Exemple de courbe accélératrice sur un mécanisme en % du KPI :
Définir la fréquence
Là encore, la réalité dépend d’un grand nombre de paramètres propre à chaque organisation. L’usage veut que la fréquence d’un plan soit la plus élevée possible : mensuel, voire trimestriel (mais il faut éviter les fréquences plus basses). Cela permet notamment d’éviter plusieurs comportements déviants :
- La faible mobilisation en début de période ;
- La gestion artificiellement “saisonnalisée” du pipe ;
- Le ralentissement du cycle de vente ;
On considère que plus la fréquence est élevée, plus cela permettra de dynamiser la vente de manière générale dans l’organisation. Les équipes commerciales aiment voir le fruit de leur travail fréquemment : augmenter le nombre de périodes et donc de paiements permet de les garder motivées au quotidien.
Conclusion
Il paraitra donc clair que la préparation du contenu du plan de compensation est essentiel à son efficacité. La tradition commerciale veut qu’un•e Sales se voit récompensé•e en perçevant un pourcentage du chiffre d’affaires (ou de la marge) généré mais ce système a des limites que les équipes Ops permettent de corriger.
Exécuter sa stratégie commerciale, c’est avant-tout savoir comment inciter chacun•e à tirer dans le même sens : cela passe inévitablement par l’intérêt financier que chacun•e y verra à la fin du mois !